Les actes respectueux : des amours contrariés ?
Aux siècles précédents, se marier n'est pas simple, il y a la pression des familles qui ont déjà un candidat en tête pour des raisons économiques (les terres se bordent, comme on dit en Normandie ! Ne riez pas, nous avons encore failli en faire les frais Minique et moi : copains de berceau, nés à 9 mois de différence, les grands-parents avaient projeté de nous marier depuis notre naissance ! J'adorais Minique (il n'est malheureusement plus parmi nous) mais comme un ami pas comme un époux possible ! A l'adolescence, nous nous sommes rendus compte en même temps de manœuvres des Anciens destinées à nous rapprocher, par exemple nous allions tirer le cidre ensemble à la cave sans personne pour nous surveiller... Oups! Puis plus âgés, vers 16 ans, nous nous sommes tous deux posés la question (sans les avis des Vieux) et avons conclu de même : nous resterons les meilleurs amis du monde, de vrais copains de berceau mais pas question de se marier, nous étions comme frères et sœurs ! Certes je n'aurais pas été malheureuse avec Minique mais ce n'était notre choix ni à l'un ni à l'autre !!!
Et beaucoup de mariages de nos ancêtres ont dû avoir lieu avec le même scénario !
Sauf qu'à l'époque , nous n'aurions peut-être pas pu échapper au plan des Anciens !
Pour se marier, il fallait l'assentiment des parents quelque soit l'âge pas seulement avant la majorité, en cas de refus de leur part, ils devaient leur adresser un acte respectueux :
« Marie Pons Moureu fille majeure et légitime de Baptiste Pons Moureu et de feue Françoise Sutra Casset, ménagère habitante de la commune du Port au hameau de Trabiet de Dessus, âgée de 25 ans accomplis étant née le 31 Octobre 1833 au Port, ancienne commune de Massat,
laquelle a par le présent déclaré et déclare qu'elle supplie respectueusement le sieur Baptiste Pons Moureu, son père, cultivateur demeurant au village de Moureu en ladite commune de Port, de lui donner son conseil sur le mariage qu'elle se propose de contracter avec Jean Subra Buissos fils majeur de feu Jean Subra Buissos et de Marie Subra del Galy et cultivateur demeurant au village de Trabiet de Dessus, en ladite commune du Port... »
Là c'est une jeune fille mais les jeunes hommes aussi se soumettent à cette procédure, même largement majeurs :
« a comparu le sieur François Piquemal Lagorre , propriétaire cultivateur, natif du quartier de Mialaques, commune de Boussenac demeurant actuellement en la commune de Saint Garriguet canton de d'Aspet, département de la Haute Garonne et fils majeur de plus de 30 ans de Simon Piquemal Lagorre et de feue Claire Bénazet de Jau mariés, lequel a dit que n'ayant pas pu parvenir à obtenir dudit Simon Piquemal Lagorre, son père le consentement au mariage qu'il se propose de contracter avec Izabeau Piquemal Jaumes fille de Georges Piquemal Jaumes et Marie Anne Piquemal Sensible, mariés, tous cultivateurs natifs du quartier de Bougareit, commune de Massat, demeurant actuellement à la commune de Juzeich susdit canton d'Aspet quoique sa naissance et ses qualités personnelles soient en rapport avec les siennes, il se voit obligé d'employer les moyens tracés par la loi pour y réussir. En conséquence il a déclaré et déclare par ce présent acte respectueux supplier humblement ledit Simon Piquemal Lagorre, son père de considérer avec attention et bonté les avantages qui résulteront de son mariage... »
L'acte, établi devant Notaire, était transmis par un personnage juré : l'huissier, qui n'est jamais bienvenu dans les vallées!!! Déjà, la procédure augure mal quant à la réussite des « tourtereaux » mais c'est la loi !
Ils devront se soumettre à 3 procédures identiques (et les payer aussi) , après si tous deux sont majeurs, ils pourront passer outre mais le « qu'en dira-t-on » ira bon bon train...et prendra fait et cause pour le père intransigeant … ou pour le jeune couple qui transgresse les règles ? En tout cas, c'est un jeu dangereux... une des parties y « perdra la face » En général, les familles s'arrangent au 2° acte voire in extremis au 3°.
« Nous Léon Galy Gasparrou Notaire en la résidence de Massat département de l'Ariège en présence des témoins bas nommés certifions avoir ce jourd'hui notifié au sieur Jean Rogalle négociant demeurant à Massat le troisième acte respectueux à lui fait le 6 Novembre 1881 enregistré avant ces présentes par M. Jean-Pierre Louis Rogalle, son fils âgé de 25 ans, sans profession demeurant à Massat... »
Espérons que les couples, forts de ce combat, sauront affronter les difficultés de la vie et seront heureux !
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