B comme Bois
Nous l'avons vu l'an dernier, la forêt et le bois sont des éléments indispensables à l'équilibre de cette économie quasi autarcique et précaire des pays de moyenne montagne. Toute réglementation restrictive comme le code forestier napoléonien, provoque des réactions violentes (D comme Demoiselles 2015). Le bois de chauffage et de construction ne sont pas seuls en cause : au XIX° siècle, on peut donner au bois une "valeur ajoutée" en fabriquant du charbon de bois dont les forges dites "à la catalane" sont de grosses dévoreuses et là, on obtient une denrée rare, du numéraire ! Des pièces sonnantes et trébuchantes qui sont si rares !
La technique de fabrication, la confection de la meule ou "fourneau" et la surveillance de la combustion sont une science et un travail de tout instant. Le processus est lent, car le bois doit se consumer sans jamais produire de flammes. Les rondins sont soigneusement empilés sur plusieurs étages séparés par des feuillages et des fougères et le tout est recouvert de terre en ne laissant qu'une cheminée centrale.
Le combustible obtenu, plus léger et moins volumineux que le bois brut, se transporte plus facilement. Par contre, le charbon de bois est aussi plus vulnérable : la moindre averse peut le gâter !
Alors les contrats de vente sont précis et détaillés pour éviter toute contestation, même entre particuliers : le 27 Avril 1828, Antoine Sutra Cole du hameau de Salvis vend, devant notaire, à Paul Laffont del Cardaÿre du hameau des Eychards, 34 sacs de charbon de bois :
"[de] chéne et de hêtre mélés, sacherie de cinq et demi sur trois et demi [mesure en pans, sans doute,], bien empoché, bon ; marchand et de ?, qu'il promet et s'oblige d'avoir fabriqué et de remetre d'ici au premier novembre prochain ..."
Viennent ensuite les conditions de livraison :
" à la charge de l'acquéreur d'aller le prendre audit quartier de Salvis, commune de Massat, au fur et à mesure qu'il sera fabriqué et de l'enlever au lieu même où il sera fabriqué, pourvu que la voiture puisse parvenir sans danger : dans le cas où la voiture ne pourrait pas arriver au lieu de fabrication, le vendeur sera tenu, comme il s'y oblige, de rapprocher à ses frais le charbon d'un lieu praticable..."
12 km environ, mais peut-être existait-il des sentiers, maintenant disparus, plus directs.. et Paul Laffont devra s'y rendre à plusieurs reprises ("au fur et à mesure"). De plus, le charbon n'attend pas, il faudra s'y rendre rapidement, un orage, si subit dans les montagnes, peut réduire le travail et l'achat à néant !
" dès le moment que le charbon sera fabriqué et que le vendeur en aura prévenu l'acquéreur, le charbon demeurera pour le compte de l'acquéreur dès le lendemain du jour où celui-ci aura été prévenu de l'enlever..."
Le montant de la transaction s'élève à 136 francs avec la précision " 12 francs pour 3 sacs" donc une charge, maintenant que nous sommes des familiers de Mercadier! Le sac revient donc à 4 francs, ce n'est pas une petite somme, une brebis coûte environ 6 francs ; on comprend mieux ce contrat de vente détaillé avec tant de minutie !
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 245 autres membres