aujols-Laffont

C'est une phrase de Jean Rouch, l'un des premiers réalisateurs sur l'Afrique et les peuples « sans écriture » ou « premiers », en effet si les gardiens de la tradition disparaissent, tout est perdu ! Et c'est le drame, des populations décimées lors des « grandes découvertes » en Amérique du Sud, par les armes mais plus encore par les maladies importées. C'est aussi le drame des Marquises en Polynésie française : les savants ou les « sachants » disparus, la société se délite...Il y avait des généalogistes dans les terres du Pacifique, une généalogie orale déclamée à partir des légendes ancestrales concernant les familles nobles. Mais c'était un métier à risque car à la moindre faute de récitation, le déclamant était sacrifié ! C'est ce que les aborigènes australiens appellent les « récits du temps du rêve ».

Je n'ai rien contre Jules Ferry, ses lois ont été salutaires pour mener nos ancêtres vers l'alphabétisation et, de ce fait, la liberté de choix MAIS, je lui reproche l'interdiction des langues régionales ; il était possible d'envisager une sorte de bilinguisme (la leçon de choses bilingue, pourquoi pas ? Et la rédaction en patois avec traduction?)

Les contes et légendes de même que les proverbes ont failli disparaître dans toutes les régions, disparitions des Anciens et des veillées...

(Mémoire de l'Arac, Proverbes du pays Massatois par Roger Toulze )

Du même auteur : un dictionnaire du Parler Biertois :

et encore plus les médications traditionnelles très efficaces souvent : les pétales de lys blanc macérés dans un alcool fort et appliqués sur la plaie contre l'infection et accélérant la cicatrisation, c'est magique ! (remède ariégeois) mais aussi la tisane de thym pour la gorge et les bronches ou la jusquiame en inhalation pour les maux de dents (« le mal tombe dans la casserole ») Attention ne pas avaler la décoction, cette plante est mortelle

Heureusement, il y eut les Folkloristes pour recueillir tout ce qui risquait de disparaître, ils n'ont eu droit au titre d'éthnographes régionaux qu'au XX° siècle mais pourtant Van Gennep ou Seignole ont produit des sommes monumentales en 4 tomes ou plus pour répertorier les coutumes régionales

Tous les recueils de contes et légendes vous invitent à imaginer ce qui se racontait dans les Veillées de vos ancêtres... les pitchouns buvaient les paroles de la conteuse, une « ménine » souvent, et les superstitions, les « paous » et les traditions s'inscrivaient dans sa mémoire souvent à son insu !

Une autre source, délaissée par les historiens et les Folkloristes : le roman de terroir et pourtant il foisonne de renseignements historiques, ethnographiques....

Qui peut ignorer Isabelle Sandy, Raymond Escholier, Dengerma pour l'Ariège

Qui peut négliger La Varende, Flaubert, Maupassant et Barbey d'Aurevilly pour la Normandie ?

Presqu'à chaque page, au fil de l'intrigue , on trouve la description d'une foire, d'un mariage, d'une fête religieuse d'un pèlerinage local ou d'événements historiques (guerres, révolutions, jacqueries). Les coutumes, la vie quotidienne apparaissent en filigrane, quelques mots parfois qu'il faut se hâter de souligner (au crayon de bois, bien sûr)

ex ?

Et puis, évoquées avec prudence les « peurs » et en particulier la sorcellerie, le Diable (je lui mets une majuscule, sait-on jamais!) mais aussi les fées sans compter la Sainte Famille qui arpentent toutes nos régions

Que vous soyez Bretons, Alsaciens,Bourguignons, Landais ou Picards, dites-moi ça marche ou pas cette quête dans le roman régionaliste ?

Et sutout, noubliez pas un genre de livre qui faisait le fureur dans l'Ancien temps : l'almanach ! Très souvent, c'était le seul livre de la maison, il en existait en patois :

Et ils paraissent encore de nos jours : une mine de renseignements sur les traditions, les légendes, les lieux à visiter, des conseils pratiques et des recettes de cuisine etc...

Enfin je viens de repérer un livre sur lequel je vais me ruer !