Un guide touristique de 1872
C’est, bien sûr, dans mon « lieu de perdition » favori, à Foix, que je viens de découvrir cette merveille ! Mes fidèles lecteurs auront reconnu « L’Ivre Livre »
Il faut, à cette époque, 1872, être un tantinet « dérangé » ou avoir une âme d’explorateur pour se risquer dans un pays si sauvage, sale et où les autochtones semblent disposés à vous filouter, et s’aventurer en Ariège! C'est, en tout cas l'impression ressentie à la lecture de ce guide. Seul le Pays basque et quelques grandes villes de cure trouvent grâce aux yeux des rédacteurs …
46 itinéraires sont proposés, sans oublier les liaisons entre Paris et les grandes villes du Sud pour lesquelles il faut entre 17 et 32 heures de trajet en chemin de fer…Une fois arrivés à Bordeaux, Toulouse, Perpignan ou Biarritz, restent à rejoindre les villes de cure ou les centres pyrénéens et ce n’est ni plus facile ni plus rapide et encore moins confortable…
Le plus truculent, c’est la partie « conseils aux voyageurs » ! Voici comment sont présentés les moyens de transport dans les montagnes. Les voitures existent : « des services de diligences, correspondant avec les trains de chemins de fer, font communiquer entre elles toutes les villes des Pyrénées. Les prix des places sont fixes dans ces voitures, quelle que soit l’affluence des voyageurs ; mais, pendant la saison des eaux, on voit surgir de toutes parts des entreprises temporaires de messagerie …leurs heures de départ et leurs prix changent plusieurs fois dans une même saison » !
Aïe, ça se gâte ! Et ce n’est pas fini :
Rassurez-vous, « si les diligences sont mauvaises, en revanche les chevaux sont excellents… » Encore faut-il être cavalier et ces dames avec leurs longues robes et leurs corsets bien serrés que leur reste-t-il ? Les ânes ou …
Les chaises à porteurs : « espèce de fauteuils mollement suspendus entre deux bâtons ou brancards, que deux hommes portent à bras ou sur leurs épaules...Il faut quatre hommes qui se reposent alternativement ».
Dernier moyen, le voyage « à pied » rarement employé par les touristes « à l’exception de quelques Anglais ». Pourtant « c’est incontestablement la manière la plus agréable et la moins fatigante de parcourir les montagnes » Décidemment, ce guide vous incite à ne pas venir !!!
Si vous êtes déterminés, que prendre dans vos bagages ?
Suivent des conseils pour les piétons, puisque finalement l’auteur a décidé de nous faire voyager à pied !
Prendre un guide ? Bien que « de bons guides peuvent être fort utiles »… « Malheureusement les bons guides sont rares dans les Pyrénées » à part ceux recommandés par la Société Ramond ou les bergers ou les chasseurs d’isards « qui connaissent parfaitement les montagnes qu’ils ont l’habitude d’explorer ».
Ouf, après tant d’émotions et de tribulations, reposons-nous ! Vite un gîte ! Zut ! « Les hôtels …laissent d’ordinaire à désirer sous le rapport de la propreté, surtout dans les départements de l’Ariège et des PO, où la poudre insecticide est malheureusement encore inconnue. Certains réduits de ces prétendus hôtels sont dans un état véritablement honteux et dénotent un degré de civilisation encore bien peu élevé ».
Les reins cassés par le voyage ou les pieds couverts d’ampoules en suivant un guide d’opérette ou véreux, ils finiront par se faire dévorer par les punaises ou les « totos » à l’étape !!! Franchement, ce guide donne envie de venir visiter les Pyrénées ! Par contre, il est très intéressant pour le généalogiste soucieux « d’habiller ses ancêtres » et de connaître leur cadre de vie, en particulier pour l’état des routes et chemins ! Voyons la situation de la vallée de Massat
« Pendant la saison des bains, service de diligences entre Saint-Girons et Massat .- Trajet en 2h 50 min [!!!! actuellement 30 minutes] .- Prix 2 fr et 1 fr 50 ». Le guide indique aussi un « chemin de fer en projet » qui ne vit jamais le jour mais dont témoigne la « route des tunnels » à Kerkabanac. (page 242)
Nous apprenons là que la vallée disposait « d’un petit établissement » exploitant « quelques sources ferrugineuses ». Lesquelles? Où se situait cet établissement ? Quelles maladies y étaient traitées? Cet établissement a-t-il existé longtemps? Encore une recherche à entreprendre pour un prochain billet...
Il faut bien avouer que la rusticité du mode de vie ariégeois a dû heurter le rédacteur qui préfère le Pays Basque ou les stations réputées de Pau et Luchon !
Cerise sur la gâteau : les pubs (bien sûr de toutes les villes d’eau connues et qui en ont les moyens) et d'autres assez surprenantes :
Pour les randonneurs, "léger" problème, elle pèse 29 kg vide…
L’eau des fées et la pommade des fées s’adaptent bien avec les superstitions ariégeoises…malheureusement la production est à Paris !
Enfin le livre comporte 6 cartes d’époque qui, bien qu’endommagées par les pliures, peuvent être très instructives.
Une carte des chemins de fer du Sud-Ouest :
Et les lointains ancêtres des cartes de randonnée, malheureusement, Massat est à la limite de deux cartes, en voici donc 2 pour couvrir le territoire de la vallée
:
Il semble qu'une malédiction plane sur mes recherches en matière de cartographie, que ce soit en Picardie (branche paternelle) en Normandie ou en en Ariège (branche maternelle), les bourgs ou villages qui me concernent sont systématiquement au niveau d'une pliure ou d'un changement de feuille, aussi bien chez Cassini que les autres ! !
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 245 autres membres