aujols-Laffont

Nous venons de le voir avec les Mémoires d'un gradé, lui-même désorienté par les ordres et contre ordres. Mais, pour les familles, il y a pire que cela ...à l'époque les soldats n'ont pas de plaques d'identification et pour celui qui ne revient pas, ses proches ne sauront jamais s'il est mort, blessé, traumatisé ou amnésique ! Cf tomber comme à Gravelottes : un cimetière rempli de tombes anonymes !!!

On retrouve le même problème pour les blessés incapables de décliner leur nom ou leur origine géographique car ils sont soit inconscients soit incompris à cause du patois qu'ils parlent

 "Du Lundi 16 Janvier 1871 à 3 heures du soir devant nous Président de la Commission municipale de Bernay a été dressé l'acte de décès d'un inconnu (mobile) décédé le 13 Janvier à 6 heures du soir  en l'hospice de cette ville, âgé de (âge ignoré), né à (le lieu de naissance ignoré) fils de (les noms, prénoms, professions et domicile des père et mère ignorés) sur la déclaration à nous faite par Stanislas Jean Nicolas, économe dudit hospice,âgé de 52 ans et Pierre Irénée Quetier, employé, âgé de 47 ans domiciliés en cette ville, non parents du décédé, lesquels ont signé"

Les Ariégeois, suivant leur habitude, avaient pris soin de dicter leur testament avant leur départ !

Voici l'exemple de'Arnaud Pujol Ségalasse qui teste devant M° Galy Gasparrou le 26 Août 1870 :

« … dans notre étude a comparu Arnaud Pujol Ségalasse, cultivateur, habitant du quartier du Touroun del Bastouet, commune de Boussenac, fils majeur et légitime de feu Jean Pujol Ségalasse et Jeanne Laffont del Cardaÿre, célibataire ; lequel sur le point de partir comme faisant partie de la Garde Nationale mobile et sain d'esprit, vue et entendement comme il nous est parfaitement apparu à nous Notaire... »

Il décèdera le 5 Avril 1871 à l'ambulance de Besançon

 " L'an 1871, le 18 Août, nous soussignés Maire de la commune de Boussenac... avons reçu de Besançon, , mort hier à 2 heures département du Doubs, l'extrait d'acte de décès dont la teneur suit. L'an 1871, le 5 Avril à 3 heures du soir, nous Victor Aristide Delavelle, adjoint délégué au Maire...avons constaté le décès d'Arnaud Pujol Ségalasse, garde mobile de l'Ariège 1° bataillon, 3° compagnie, mort hier à 2 heures, âgé de 21 ans, natif de Boussenac et y domicilié, étant à l'ambulance de St Féréol de Besançon, fils de Jean Pujol et de Jeanne Laffont del Cardaÿre, épouse sur la déclaration à nous faite par Félix Bernard, infirmier ... et par Aimé Maury ...."

 Un autre mobile de l'Ariège, originaire de Boussenac est décédé le 6 Janvier 1871

 "L'an 1871, le 6 Février, nous Maire de la Commune de Boussenac, canton de Massat, département de l'Ariège, avons reçu de l'intendant militaire d'Angers (Maine et Loire) l'extrait d'acte de décès dont le contenu suit : Commune d'Angers Hôpital civil d'Angers du registre des décès dudit hôpital a été extrait ce qui suit :Le nommé Laffitte Jean, mobile de l'Ariège inscrit sur le matricule sous le numéro 1164, né le 17 Juin 1847 à Boussenac ....fils de Michel et de Galy Elizabeth Brusquet est entré audit hôpital le 11 du mois de Décembre 1870 et y est décédé le 6 du mois de Janvier 1871 à 3 heures du soir par suite de fièvre typhoïde 

Je soussigné officier comptable dudit hôpital certifie le présent extrait véritable et conforme aux registres des décès dudit hôpital. Fait à Angers le 7 Janvier 1871 Aury signé 

Vu pour légalisation de la signature de M Aury comptable de l'hôpital d'Angers, le sous intendant militaire More signé

Pour copie conforme à l'extrait délivré par le sous intendant militaire de la place d'Angers (Maine et Loire)"

Après consultation des registres de Boussenac, il s'agit de Jean Laffitte Fitou, mais les registres matricules de 1870 ne sont pas en ligne 

A l'issue du conflit, l'armée est incapable de recenser les morts et disparus faute d'avoir procéder à un appel en règle à chaque étape de l'engagement De plus, nous avons vu que soldat et officiers se sont permis de « fausser compagnie » à leur régiment au cours de la retraite …

C'est donc par la presse que l'on demande aux rescapés de se faire connaître !

(L'Ariégeois du 14 Juin 1871)

Le 6 Septembre suivant, la première partie du  travail (le recensement) semble achevée :

C'est, sans doute, une des raisons du faible nombre de monuments aux morts de la guerre de 1870. Beaucoup de victimes sont inconnues comme sur les tombes du cimetière de Gravelotte et toutes les victimes n'ont pas dû être recensées

En voici pourtant un,  situé à Bernay peu fréquenté et fleuri (sauf pour la photo) Il est souvent inconnu des Bernayens eux mêmes !

Sur celui de Livet sur Authou (pas très loin de là) 2 noms seulement sont indiqués :