aujols-Laffont

83 livres et du fromage d'orry

C'est le bail que signe Jean Laffont del Cardaÿre pour obtenir le métayage de la propriété de M° Pierre Mondin , avocat au parlement de Mirepoix, le 28 Août 1777 :

 loyer métairie 1777.PNG

« La rente annuelle de quatre vingt trois livres en argent, de six livres de fromage d'orri et de quinze livres de beurre, payable la dite somme de 83 livres la moitié à la Toussaint et autre moitié à Quasimodo de chacune des des dites six années à commencer à la Toussaint de l'année prochaine 1778 et ainsi consécutivement d'année en année pendant lesdites six années , le fromage et la moitié du beurre en Careme et autre moitié dudit beurre le long de l'année, à commencer le careme prochain et ainsi aussi consécutivement pendant la durée du présent bail... »

 

La métairie est située au parsan des Eichards à Boussenac, Jean doit être un cadet qui prend cette location pour éviter d'être en surnombre à l'oustal mais faute de filiation dans le bail, je ne peux pas l'affirmer : les Jean sont si nombreux !!!

 

Le même jour, le même propriétaire signe un autre bail de métayage avec François Laffont del Cardaÿre (encore une fois faute de filiation, impossible de savoir les liens de parenté entre les deux signataires) mais pour lui aussi le loyer inclura du fromage et du beurre :

 loyer autre métairie pour François 1777.PNG

«  en moyennant la rente annuelle de 350 livres, 10 livres de fromage d'orri et 35 livres de beurre payable ladite somme de 350 livres argent scavoir la moitié à Quasimodo et l'autre moitié à la St Barthélémy, le fromage et la moitié du beurre en carême, l'autre moitié le long de l'année... à commencer à Quasimodo prochain... »

 

Il semble bien que le métayage de François soit nettement plus important que celui de Jean : 83 livres, 6 livres de fromage et 35 livres de beurre ; alors que François paie 350 livres et 10 livres de fromage et 35 livres de beurre ; alors comparons leurs biens en location :

 

  • métairie Jean

métairie des Eichards 1819.2PNG.PNG

 « Un batiment de borde construit de pierre et de terre, le couvert de paille en médiocre état, et une pièce de terre labourable, ce tout joignant et contigu et en un pred appelé le prat des Rius?, avec les eaux qui en dépandent dont du tout ledit Laffont a dit être satisfait ... »

 

  • métairie François
  • métairie François.PNG

 « consistant en deux batiments de bordes baties de pierre et terre le couvert de paille, lieu appelé le Sarrat et l'autre la Buere, celle du Sarrat en bon état et l'autre en mauvais état et en terres labourables, cultes et incultes, preds et eaux, le tout dépendant desdits deux batiments de borde, dont ledit Laffont a dit être acertainé et content... »

 

Un batiment de borde délabré en plus, justifie-t-il la différence de rente annuelle, sans doute pas, il semble qu'il faille chercher la différence dans le troupeau confié aux métayers : celui qui est alloué à François est estimé à 704 livres, celui de Jean à seulement 193 livres !

 

 

Sautons allègrement 60 années vers le futur, c'est le privilège du généalogiste et de l'historien (pour le passé au moins) pour voir si les baux signés après 1789 comportent encore des loyers en nature

ça tombe bien un autre Laffont : Paul prend en métayage une ferme aux Eichards le 28 Septembre 1836 soit 60 ans plus tard. La comparaison est facile, le terroir est le même :

 

  • loyer 1836.PNG

 « Le 28 Avril 1837 et moyennant la rente annuelle de 600 francs et 10 kilogrammes...de beurre, le tout payable à Saint Lizier au domicile et entre les mains de Mademoiselle Paille, savoir, la somme de 600 francs en espèces métalliques de cours le jour de la foire de Quazimodo de chaque année et le beurre marchand et de recette à la même époque, par le preneur qui s'y oblige... »

 

loyer 1836 2.PNG
  

En tout cas, le fromage et le beurre ont une valeur indéniable dans le paiement des loyers de métayage. Dans les pays d'Oïl, j'ai retrouvé plutôt des volailles, en particulier des chapons comme part en nature des baux de fermage ou métayage.

 

Au détour des recherches pour ce billet, j'ai retrouvé un mot qu'employait souvent ma grand-mère Marguerite Laffont : « acertainé », un mot disparu du langage commun, comme beaucoup d'autres que j'aime à employer (« palanquée », « gésir » ou « arguer » etc...) et Mémé quand on mettait une de ses décisions en doute, répondait d'un ton péremptoire « Ah mais je m'en suis acertainée ! » Nul n'osait alors mettre en doute la décision de l'aïnada ! Elle le savait, bien sûr, et m'a transmis la fierté et le poids de cette condition : je suis fille unique (mes enfants m'appellent "la matriarche", sans référence à mon poids, je suis plutôt maigre,"une saucisse" comme on dit en Normandie pour les vaches qui mangent et ne"profitent" pas ! )

 

 



08/08/2019
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