D comme Distribution des Prix
Certains d'entre vous doivent encore avoir en mémoire ces fêtes de fin d'année rassemblant sur une estrade le corps enseignant au grand complet, principal en tête, tout ou partie des élus municipaux et dans le public les parents endimanchés accompagnant leur progéniture "tirée à quatre épingles". A l'appel de son nom, l'heureux lauréat, tout tremblant, grimpe sur l'estrade pour recevoir un lot plus ou moins épais de livres. Une fête, non plutôt un cauchemar pour moi...le trac, la peur de décevoir les parents, de louper une marche en grimpant sur l'estrade. Cette cérémonie semble avoir disparu dans les années 1970
Dans certaines familles, ce serait les seuls livres qui entreraient dans la maison, ils en étaient d'autant plus précieux pour tous, lecteurs ou non...
Un voyage dans le temps, certes mais aussi dans le mentalités ! En triant un débarras, on retrouve des tonnes d'indices généalogiques et tout est bon à exploiter : correspondances, cartes postales, photos et livres,
Ces livres comportent parfois des «étiquettes » sur l'envers de la reliure et voilà un document généalogique inédit ou peu exploité :
"R[enée] Hocry 23 Juillet 1904"
Ce livre « l'allumeur de réverbères » par Miss Cumins est édité par les Editions Hachette en 1902;mais c'est surtout l'étiquette qui retient mon attention ! R Hocry est ma grand-mère paternelle en 1904, elle a 15 ans. Elle est interne à Epernay au collège en classe de Primaire A et elle semble s'y comporter très bien
Encore des prix pour ma grand-mère Renée Marcelle, en arithmétique, récitation et écriture plus un prix de « satisfaction » sans doute de bon comportement.
En 1896 et 1899, elle fréquente donc le Pensionnat Sainte Chrétienne à Epernay et se montre sage et laborieuse.
De précieux renseignements pour ceux qui veulent « habiller » leurs ancêtres ! En effet, ma grand-mère (épouse Moraux) est décédée, jeune encore de la fièvre typhoïde, son époux (nageur hors pair) est mort noyé dans la Marne à quelques mois de distance... Alors les grands-parents Hocry ont décidé d'adopter leurs deux petits enfants d'où mon patronyme composé.
Mieux encore j'ai trouvé un livre de prix de mon arrière grand-mère Jeanne Pennieng 'épouse Hocry):
Même institution que sa fille et, elle aussi, un prix d'arithmétique en 1884 ; qui a dit que les filles n'étaient « matheuses » ? Elles ont donné vie à mon père, ingénieur des Arts et Métiers!!! Mais le miracle ne se reproduit pas à chaque génération : je suis une « bille » en Maths !
Voilà pour les renseignements généalogiques, appréciables déjà, maintenant, comme je suis une lectrice boulimique, j'ai entrepris la lecture de ces livres qui représentent la bonne éducation, l'éthique même de la vie familiale et du bon comportement. Bien sûr, ils sont soigneusement choisis ces livres de prix et peut-être même écrits « sur commande » car je n'ai jamais retrouvé le nom d'un auteur connu parmi ceux qui les écrivent.
C'est une littérature assez soporifique et lénifiante mais les grandes lignes qui s'en dégagent représentent bien la société du XIX° et début XX° siècle : la méchanceté et la bonté cohabitent et s'affrontent. Dites-moi qui gagne ? La bonté, bien sûr, la Foi salvatrice permet de supporter toutes les épreuves... Mais cette littérature est révélatrice de ce qui était inculqué à nos grands-mères (qu'elles soient du Nord ou du Sud!) et ce n'est pas avec cette éducation faite de compassion, de renoncement et de patience infinie qu'elles auraient pu se défendre seules, la femme restait donc une « éternelle mineure » conditionnée depuis l'enfance, même si elle était brillante dans ses études !
Il faut la marier pour qu'elle ait un défenseur, parfois il se révèle être un traître ; la Foi aidera la pauvre femme à supporter son malheur (un chemin de croix)
Il me semble donc que nos grands-mères ont été « formatées » dès l'enfance pour entrer dans le « moule » de la société Ok, c'est encore le cas mais là, c'est vraiment flagrant ; je les lis ces livres de prix de mes grands-mères mais j'ai envie de hurler à chaque page mes convictions féministes !
Mais pour bien comprendre nos ancêtres ne faut-il pas essayer de se replonger dans leurs modes de pensée, même désuets ou scandaleux à nos yeux, et ce n'est pas facile !!!
François Laffont, lui, semble avoir été un Républicain convaincu, c'est en tout cas ce qu'affirme M° Galy Gasparrou, le Maire de Massat pour lui faire obtenir un poste de facteur des postes.
Pour ses filles, des études avant tout et ce n'est pas courant début XX° siècle, peut-être un rêve d'en faire des institutrices et les deux réussiront, même si ma grand-mêre a peu exercé, sa sœur Jeanne sera « une hussarde noire de la République » et directrice d'école. Mais voilà l'envers de la médaille : les filles doivent étudier et réussir donc pas de patois à la maison que du « bon » français et François le parlait bien (peut-être avec un accent) donc aucune des descendantes de François ne parlaient la langue de leur père ni de leur mère originaire de la Manche Seul le Se Canto a survécu pour Marguerite, ma GM, pour Eliane, ma mère et pour moi « dans la langue du pays » c'est à dire plus proche du gascon que du languedocien. Mon cousin Jean, petit fils de François et fils de Jeanne, la cadette, ne connaît pas cet hymne pyrénéen …mes cousins germains, enfants de Jeanine, ma tante, non plus... Mystère de la transmission dans les familles !!!
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