Quand les terres portaient un nom
Le rapport du Pyrénéen, du basque à l'Ariégeois à la maison ancestrale (etche ou oustal) indique une notion de lignée à la base de toute relation sociale. Je suis plongée dans la lecture d'un livre dont le narrateur est espagnol originaire du Pallars et les traditions sont identiques. Il faut d'ailleurs pour comprendre la région des Pyrénées, se faire à l'idée qu'une frontière n'existe pas réellement pour les habitants. C'est une ligne imaginaire ne figurant que sur les cartes établies entre deux gouvernements Sur le terrain, les liens sont plus proches entre un Aranais et un Ariégeois qu'entre eux et les Madrilènes ou les Parisiens !
Mais si la maison occupe la place centrale, elle revêt presque le sens de famille élargie, elle a plus d'importance que l'héritier lui-même, ce qui me frappe c'est que les terres aussi portent un nom
(Testament de Marie Laffont del Cardaÿre 24-10-1879 M° Galy Gasparrou)
« Mon patrimoine se compose d'une pièce de terre labourable, dite Lacanal, située au dit quartier du Caychounet de contenance de 21 ares, telle qu'elle est désignée au cadastre de la commune de Massat, estimée 720 fr... »
Marie ne lègue qu'un seul bien mais il porte un nom, de même Louis Piquemal Pastre a lègué des dizaines de terres qui, toutes, sont nommées
(testament partage de Louis Piquemal Pastre 4-6-1887 chez M° Galy Gasparrou)
« 4° labourable dite Ribote del Paous, de contenance de 9 ares 65 centiares estimée 220 fr
5° pré et pâture contigües, appelée la Tiejo del Paous, de contenance de 44 ares 46 centiares , estimée 1400 fr
6° bois dit dessus la Carole de la Rivière, de contenance de 18 ares 78 centiares , estimée 90 fr
7° bois dit les Timbale , de contenance de 23 ares ... »
Est-ce seulement un cadastre traditionnel non écrit ? Cherchez bien, ces noms ne figurent sur aucun plan cadastral et pourtant ils ne varient pas sur plus de 200 ans dans les actes notariés même en cas de vente. La toponymie connaît les micro toponymes : lieux-dits, hameaux ou même ferme qui sont inscrits sur les cartes dites d'état major au 25,000° mais ces dénominations sont encore plus petites !
Est-ce l'effet de l'attachement de nos ancêtres à leur terre, leur connaissance du terroir au mètre près qui a généré ces noms perpétués par les générations successives ? En tout cas, il me semble plus difficile de vendre une maison ou une terre qui porte un nom qu'une maison ne portant qu'un numéro de rue, de même que pour un éleveur, j'imagine, qu'une bête « baptisée » ne se vend pas ou difficilement.
Pardonnez-moi cette ethno-généalogie sentimentale et peut-être fiction car je ne sais pas si mon interprétation correspond à ce que pensaient nos Anciens...J'aimerais avoir votre ressenti et vos découvertes personnelles Merci d'avance !
Ce n'est qu'à la fin du XIX° que les notaires ajoutent le numéro de parcelle au nom traditionnel
(partage Loubet del Roux 1-2-1884 M° Galy Gasparrou)
« 7° un bois dit coume de la Laou, de contenance de 9 ares 90 centiares , désigné au dit plan, même section sous le numéro 2198
8° un labourable dit Matas, de contenance de 5 ares 50 centiares , désigné au dit plan, même section, sous le numéro 2233 »
On le voit bien dans ces exemples, ce n'est pas la superficie de la terre qui fait qu'elle porte un nom : dans tous nos extraits, pas une terre d'un hectare... encore une preuve aussi du morcellement des biens !
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