aujols-Laffont

En patois le Campanè(r). Il est indispensable, il rythme vie du village en sonnant l'Angélus et les Vêpres pour nos ancêtres (qui n'avaient pas de montres, trop onéreuses) c'était le seul indicateur temporel...à part le soleil qu'ils savaient « lire » aussi ! Il invite aussi à la messe dominicale.

Il rythme la vie de chaque individu avec trois sons de cloches pour une vie ! Souvenez-vous, pour les Anciens, qu'une vie, celle de Jean François Michaud dans la chanson de Piaf et des Compagnons de la Chanson, se résume à ces trois sonneries, deux en branle : son baptême et son mariage, une en glas, qui tristement sonne son décès. Mais tout le village même s'il ne fait pas partie de la parentèle ou des voisins est informé même dans les hameaux, le son porte loin en montagne !

Alors quand les cloches « partent pour Rome », le Vendredi Saint, tout le monde est désorienté, il n'y a plus de repère temporel ! Heureusement Pâques arrive bientôt et les cloches reviennent et vont sonner à branle comme pour Noël ! Christ est ressuscité et ça mérite bien que le Campanè tire sur la corde !

Il est là d'ailleurs là, au Cami des Encantats :

 Alors les néo-ruraux qui sont importunés par les cloches ou le chant des coqs m'énervent...restez en ville ! La campagne a ses bruits, certes, mais qui sont utiles ! Que diraient-ils si leur maison flambait et que personne ne sonne le tocsin en les laissant « cramer » dedans ? Je sais, ils auraient appelé le 18 avec leur portable (qui passe très mal dans la vallée de Massat ) mais nos ancêtres n'avaient pas de portables (petite saute d'humeur)

Pour les cloches, il y a eu deux périodes difficiles ; la Révolution qui les a réquisitionnées pour les fondre en canons et la séparation de l'Eglise et de l'Etat : les sonneries de cloches sont-elles civiles ou religieuses?Que peut et doit faire un sonneur républicain ?

Le problème n'a pas manqué d'émerger dans la vallée de Massat , ils sont tellement procéduriers ces Massadels !

Donc l'affaire de Boussenac arrive jusqu'au Préfet qui tente de « recadrer » l'emploi des cloches :

« J'ai l'honneur de vous communiquer une lettre par laquelle M le Maire de Boussenac fait connaître que le ??? « personne chargée des fonctions de carillonneur refuse de sonner et défend à qui que ce soit de toucher les cloches ... »

Alors le Préfet recadre l'utilisation des cloches :

« Les cloches des édifices publics servaient à l'exercice public du culte peuvent être employées aux sonneries civiles dans les cas de péril commun qui exigent un prompt secours.

Une clef du clocher est déposée entre les mains du desservant, une autre entre les mains du Maire qui peut en faire usage pour les sonneries publiques et l'entretien du clocher et de l'horloge publique si l'entrée du clocher n 'est pas indépendante de celle de l'église , une clef est déposée entre les mains du Maire.

Mais il n'appartient pas au Maire de faire sonner les cloches pour les baptêmes, mariages ou enterrements religieux même en l'absence du ministre du culte... »

Pourtant la cloche a une âme, il me semble d'ailleurs que c'est ainsi qu'on définit sa tonalité (comme un violon), mais en plus elle est baptisée et a des parrain(s) et marraine(s)

Elle appelle à Dieu, à la joie, elle prévient du danger ; des cloches qui se taisent, pour nos ancêtres, c'est la communication qui disparaît : plus d'appel au secours possible !

Mais en Ariège, elles ont en plus des pouvoirs magiques ; on dit qu'elles peuvent repousser l'orage et la grêle et donc éviter une catastrophe économique ; encore faut-il que le curé ou le sonneur les mettent en branle au bon moment et sortent par tous les temps pour défendre le village !

Il y a encore beaucoup à raconter sur les cloches comme leur fabrication , fondre une cloche ou un canon n'a rien à voir, leur financement aussi, c'est cher une cloche ...Cela fera l'objet d'autres billets.